Prise de poids, absence de règles… Cinq idées reçues erronées sur le sport et la contraception

Prise de poids, absence de règles… Cinq idées reçues erronées sur le sport et la contraception

Une très grande majorité de femmes ont recours dans leur vie à un moyen de contraception. Les sportives de haut niveau aussi. Tout comme les règles ou les autres sujets entourant le corps féminin, le sujet de la contraception est rarement abordé en sport, que ce soit sur le terrain ou dans les médias. Ainsi, de nombreux préjugés et méconnaissances perdurent au détriment, parfois, de la santé des athlètes.

Nous en avons déconstruit cinq.

1. La contraception augmente les performances sportives

La médecine est formelle sur ce point : il n’y a pas de bénéfice de la contraception sur les performances des sportives. C’est pour cela qu’aucune pilule contraceptive, par exemple, ne figure dans la liste des médicaments interdits par l’Agence mondiale antidopage. « On ne se dope pas avec la pilule », insiste Carole Maître, gynécologue au sein de l’Insep (l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance).

Si elle ne permet pas d’augmenter les performances sportives, la contraception peut néanmoins « avoir des bénéfices secondaires », comme le souligne la gynécologue : « traiter une prise de poids prémenstruelle, un syndrome pré-menstruel, avec des jambes lourdes, avec des ballonnements, gonflements ou douleurs de la poitrine, douleurs de ventre. L’athlète sera alors plus disponible pour son activité. »

Thierry Adam, gynécologue-obsteréticien, médecin du sport et auteur de Gynécologie du sport – Risques et bénéfices de l’activité physique chez la femme, confirme que « le cahier des charges d’une contraception chez une sportive est que ça n’affecte pas son niveau de performance ». Le médecin doit pouvoir proposer une contraception adaptée à l’athlète en ce sens et avec, bien évidemment, son accord. « On n’impose pas une méthode de contraception, ni chez une patiente sédentaire, ni chez une sportive de haut niveau. Ça exige, de la part du médecin, de bien l’informer et, de la part de la patiente, une certaine confiance, une certaine ouverture d’esprit et une certaine écoute. »

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2. La contraception fait prendre du poids

C’est peut-être l’idée reçue la plus répandue sur la contraception : cette dernière, et plus particulièrement la pilule, ferait prendre du poids. Pourtant, comme le rappelle la gynécologue Carole Maître, « actuellement, les pilules peuvent permettre de ne pas prendre 500 g ». Si une femme choisit de prendre la pilule, un large éventail de produits est disponible, comme des « pilules faiblement dosées en œstrogène de synthèse, des pilules microprogestative, etc. Le choix est tel que l’on doit trouver ce qui vous convient le mieux », assure la médecin.

De son côté, Thierry Adam constate aussi la persistance de cette croyance sur la pilule qui ferait grossir. « La majorité des patientes réfléchissent encore en fonction des pilules d’il y a cinquante ans. Quand elles sont arrivées sur le marché, elles étaient beaucoup plus dosées. Et ça pouvait poser problème quant à la prise de poids », note-t-il.

Prise de poids, absence de règles… Cinq idées reçues erronées sur le sport et la contraception

Toutefois, le gynécologue refuse de balayer d’un revers de main les inquiétudes des patientes. « On peut dire qu’il n’y a pas de logique dans les hormones et je pense qu’il ne faut pas dire qu’à 100 %, il n’y a pas de prise de poids », nuance le médecin qui a notamment exercé au sein de l’équipe de France féminine de cyclisme. « Prendre 1 kg, ce ne sera pas significatif chez une patiente classique, mais pour une sportive de haut niveau ça l’est. Une cycliste qui prend 1 kg, sur l’ascension du mont Ventoux, elle prend 40 secondes de retard au sommet », explique le gynécologue.

En « jouant sur le dosage et la molécule », Thierry Adam essaye de trouver la pilule qui correspondra le mieux à sa patiente et lui évitera une éventuelle prise de poids.

Une prise en charge sur-mesure et d’autant plus nécessaire que la crainte de prendre du poids peut engendrer des arrêts de pilule, avec des conséquences dramatiques pour les femmes, comme des grossesses non désirées. « On doit être très vigilants. Il faut vraiment dire aux patientes que s’il y a quoique ce soit après la prise de la pilule, elle peut consulter à nouveau et qu’on trouvera ensemble une autre contraception orale qui lui convient car il y a le choix », insiste Carole Maître.

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3. Décaler ou supprimer ses règles avec la contraception n’est pas bon pour la santé

Thierry Adam relève qu’une idée reçue circule encore beaucoup à ce sujet : « Certaines patientes ont parfois l’impression que ce n’est pas trop bon pour leur santé de ne pas avoir de règles ou de décaler les règles en disant “Ce n’est pas naturel”. »

Pourtant ne plus avoir ses règles grâce à la contraception est tout à fait possible et sans danger. « Avec la pilule, on peut ne pas faire d’arrêt. Avec certaines pilules, il n’y a que deux jours de pause. Ou sept jours de pause. Si on ne fait pas cette pause, on peut ne pas avoir ses règles », détaille Carole Maître. Néanmoins, comme le relève la gynécologue, « ce n’est pas forcément ce que les sportives recherchent. Peut-être parfois de façon très ponctuelle au moment d’une compétition particulière, ou dans certains sports qui se pratiquent dans l’eau ou en justaucorps ».

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4. La pilule est dangereuse pour la santé des sportives

Les moyens de contraception sont très nombreux : pilule, stérilet, implant, patch, préservatif, stérilisation masculine et féminine, abstinence périodique, retrait, etc. Les Si les Françaises sont de plus en plus nombreuses à préférer un dispositif intra-utérin (DIU), l’autre nom du stérilet, la pilule reste la méthode majoritaire.

Carole Maître rappelle que, depuis 2013, les médecins ne prescrivent plus de la même manière la pilule. « Les recommandations ont évolué concernant les pilules oestroprogestatives, qui combinent les deux hormones : œstrogène de synthèse et progestérone de synthèse. Actuellement, il est recommandé de bien prescrire un oestroprogestatif en deuxième intention du fait du risque thromboembolique qu’on connaît et du fait du risque artériel qui existe avec toutes les pilules », rappelle ainsi la gynécologue.

Ces risques de thrombose ont fait l’objet d’un vaste débat médiatique généré par une affaire qui remonte à une dizaine d’années. En décembre 2012, une jeune fille porte plainte contre un grand laboratoire pharmaceutique. Elle accuse la pilule de troisième génération qu’il fabrique d’avoir causé l’accident vasculaire cérébral qui l’a laissée lourdement handicapée.

Pour rappel, selon l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé), les risques de thromboses veineuses, c’est-à-dire de phlébite ou d’embolie pulmonaire, sont de 0,5 à 1 cas pour 10 000 femmes non-utilisatrices de pilules ; de 2 cas pour 10 000 femmes utilisatrices de pilules combinées de 2e génération ; et de 3 à 4 cas pour 10 000 femmes utilisatrices de pilules combinées de 3e génération.

5. Le stérilet n’est pas une bonne option pour les athlètes

Même si elle n’a jamais eu d’enfant et même si elle est jeune, une femme peut avoir recours à un stérilet. Les sportives aussi. Il en existe deux types : stérilet au cuivre ou stérilet progestatif. « Et dans les deux cas, il est important que la sportive sache que l’ovulation est préservée », prévient Carole Maître.

Le choix entre ces deux types de stérilet revient évidemment à la sportive et dépend également de l’abondance ou non des saignements durant ses règles : « Si elle est déjà presque en oligoménorrhée (diminution du volume et de la durée des règles), avec des règles très faibles, elle aura le choix entre le stérilet au cuivre, qui pourrait augmenter un peu l’abondance de ses règles, mais ce n’est pas systématique, et le stérilet progestatif qui, en cas de règles très peu abondantes, peut entraîner une absence de règle puisqu’il diminue l’épaisseur de la muqueuse utérine. »

De son côté, Thierry Adam ne recommande pas particulièrement le stérilet au cuivre pour les sportives de haut niveau. « En particulier dans les sports d’endurance, où il y a énormément de carences en fer », précise-t-il. Le stérilet au cuivre a, en effet, « plutôt tendance à approfondir encore la carence en fer. Et qui dit carence en fer, même sans anémie, ce n’est pas très bon pour la performance », assure le gynécologue. Mais le praticien insiste : le choix revient à la patiente : « Un gynécologue n’est pas là pour imposer une méthode que lui pense être la meilleure. On est là pour proposer ce que l’on pense être le meilleur en fonction de notre expérience. À la fin, c’est la sportive qui va choisir sa contraception. »

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